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Collections passion (05.06 - 31.12.1982)

L'entrée de l'exposition présente une collection privée d'objets funéraires de l'Arabie du Sud, datant de plus de 2000 ans. Nous voulons par là répondre à l'attente du visiteur qui vient chercher des objets de cette qualité dans l'institution muséale et nous jouons le jeu afin de mieux le décontenancer par la suite.

Un premier espace permet de poser toute une série de questions en guise d'introduction. Les animaux collec-tionnent-ils? Après l'exemple des milans noirs, des oiseaux-jardiniers et du hamster, nous pénétrons dans les sociétés humaines où le fait de collectionner semble être lié à la sédentarisation et à la possibilité de dégager des surplus. Qui dit surplus dit administration, qui dit administration dit hiérarchie, qui dit hiérarchie dit pouvoir, qui dit pouvoir dit Etat. Ces théories sont bien connues des ethnologues et en peticulier des marxistes qui en déduisent des réflexions importantes sur la naissance de l'Etat à partir des sociétés hydrauliques.

Les collectionneurs en herbe évoqués, nous avons voulu poser le problème du classement, de l'amassement et de la possibilité de constituer des collections à travers un matériel didactique et scolaire important.

Nous avons abordé aussi la collection dans le contexte économique: les kiosques et la fabrication de produits alimentaires sont-ils aussi des éléments incitant à la collection? Lorsque l'on sait que 350.000 familles suisses collectionnent des livres contre un certain nombre de points proposés pour les récompenser de leur fidélité, il y a là un marché et un phénomène dont l'ampleur laisse songeur.

Le problème de la collection de copies, du vrai et du faux, de la solidarité qui naît entre les collectionneurs par des journaux et les sociétés spécialisées met un point final à ce premier ensemble d'interrogations que nous avons volontairement laissé ouvert pour permettre aux enfants et aux adolescents jusqu'à 16 ans d'apporter leurs collections au Musée afin que nous puissions nous rendre compte de l'importance de cette activité parmi la jeunesse.

Que collectionne-t-on ? Tout ou presque, il est vrai, et nous avons répondu à cette question dans un deuxième espace par divers exemples en mélangeant à dessein des objets précieux avec des objets habituellement considérés comme banals et ordinaires. Nous avons consacré un secteur au problème des collections et des institutions. La préhistoire, avec les exemples d'Auvernier et de Cortaillod permet de poser le principe même de la collection. Le mobilier funéraire égyptien appartenant au Musée d'ethnographie nous permet de réfléchir sur l'importance de la tombe comme lieu de collection qui, à travers le mobilier funéraire, marque le passage entre le visible et l'invisible. La collecte du monde et la collecte des hommes a retenu notre attention tout comme le passage des collections privées aux collections publiques avec la naissance du musée d'ethnographie issu du «cabinet de curiosités».

La mission Dakar-Djibouti (1931-1933) est évoquée dans cette exposition avec des documents d'époque, des pièces rapportées au cours de l'expédition, notamment le fameux «cochon de lait» du culte kono dont le vol est décrit par Michel Leiris dans L'Afrique fantôme. Officialité et sc'entificité devraient permettre de poser la question du rôle du musée, lieu de sanctification des collections qui, par le rite d'entrée, de l'inventaire à la fiche descriptive munie d'une photographie, donne à l'objet son statut privilégié.

Un troisième espace, les objets de leur passion, nous permet de montrer quelques options de collectionneurs. Nous avons évidemment privilégié un cas exemplaire, celui de la collection Georges Amoudruz du Musée d'ethnographie de Genève. Cette collection à elle seule nous permet de servir de modèle à toute réflexion sur la collection: accumulation, thésaurisation, classement, systématisation, obsession, domination et possession constituent des éléments de la passion et trouvent des réponses tout en reposant des questions. Nous avons tenté d'esquisser à travers des exemples l'organisation de collections: tire-bouchons, allumettes, boîtes de camembert, lanternes magiques, timbres-poste.

Enfin dans un quatrième espace nous avons ouvert le Musée d'ethnographie à la réflexion d'artistes contemporains sur le rôle du Musée et, partant, des collections. Le Musée en tiroirs de Herbert Distel introduit à cette problématique du classement, de la conservation et de la mise en boîte du savoir. Enfin, gràce à un collectionneur-créateur, mécène des temps nouveaux qui fait agir les artistes sur deux thèmes de collections: les cigares et rubans de cigares, et le Cervin, nous franchissons peut-être les limites du rationnel pour entrer dans le domaine de l'insondable et par là chacun aura la possibilité de se situer. Des collections d'artistes termineront ce voyage: négatifs de polaroïd, boules de gomme, couchers de soleil. Le visiteur pourra enfin dialoguer et par la suite se faire collectionner par ce grand collectionneur des temps nouveaux: l'ordinateur.

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