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Le mal et la douleur (07.06.1986 - 04.01.1987)

Encore dans toutes les mémoires, la photo primée qui montre Omaira Sanchez et ouvrait l'exposition résume à la fois catastrophe, douleur et faute humaine.

La découverte de la douleur est à l'origine de la réflexion bouddhique, comme le péché marque la doctrine judéo-chrétienne. Dans les deux conceptions, une lutte devra s'engager contre les démons.

Il arrive que la souffrance soit sciemment imposée lors des épreuves corporelles que comportent les rituels d'initiation tant féminins que masculins. Mais en général l'homme cherche à se garder du mal, à guérir les maladies, voire à forcer le bonheur par une multitude de pratiques, les unes dites «scientifiques», les autres «magiques». Chez les Dayak de Bornéo, les statues hampatong sont destinées à protéger la communauté des esprits néfastes qui l'entourent, et les bijoux les individus. A Madagascar, au Proche-Orient, au Pérou et jusqu'en Europe, de nos jours encore, les amulettes se multiplient. La sorcellerie n'est souvent pas loin, évoquée ici à travers les coutumes des Batak de Sumatra.

Contre les maladies, les techniques sont innombrables. A Java, au delà du simple spectacle, les marionnettes du théâtre d'ombres fonctionnent comme un rite d'exorcisme. Au Sri Lanka, les masques personnifiant des démons permettent également de conjurer le mal et la maladie. Et partout dans le monde, la musique peut intervenir dans un cadre curatif. Quant aux statues à clous du Congo et du Zaïre, non seulement elles préservaient des maladies mais pouvaient servir à diriger des forces maléfiques.

Mais le sorcier risque de voir se retourner contre lui les puissances qu'il déclenche et encourt la condamnation de la communauté. Or que penser des moyens d'arracher des aveux et de la peine capitale, si horrible ait été le crime que l'exécution du «coupable» est censée expier ? Rien n'empêchera toutefois les séductions sataniques de s'exercer ni l'esthétisme du mal de s'épanouir.

Il est encore des maux qui dépassent l'homme: épidémies, cataclysmes, souvent assimilés à des punitions divines. Ainsi la peste au moyen âge et de nos jours le SIDA. L'homme enfin est parfois responsable de catastrophes, quand il ne développe pas pour la guerre le pouvoir destructeur que rend possible la technologie. En même temps qu'elle s'ingénie à diminuer toute douleur physique, à l'évacuer par tous les moyens, notre société est saturée par les médias d'images négatives révélant la faiblesse de l'idéologie du progrès technique qui porte en lui sa propre destruction. L'avenir imposera sans doute des choix qui ne sont pas forcément ceux des autorités politiques.

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