Le Cabinet d'histoire naturelle de Charles Daniel de Meuron
Au XVIe siècle, voyageurs, savants, marchands, militaires et missionnaires s'élancent vers de nouvelles terres. Ils recueillent d’étranges objets: coquil-lages, pierres précieuses, plantes rares, oiseaux, reptiles et artefacts. Ainsi naissent les cabinets de curio-sités, où les naturalia, représentant l’animal, le végétal et le minéral, côtoient les artificialia, résultats de la production humaine.
La curiosité pour l’histoire et l’histoire naturelle ne change pas de nature du XVIe au XVIIIe siècle, qui voit naîtrel’Encyclopédie et dispose d’un projet anthropologique, d’une première vue d’ensemble du monde.
Le mot d’ethnologie apparaît en 1788 sous la plume du pasteur lausannois Chavannes; l'historien allemand Niebuhr et le géographe vénitien Balbi utilisent le terme d’ethnographie.
Parmi d’autres collectionneurs,Charles Daniel de Meuron est à l'origine des musées de Neuchâtel par la donation de son Cabinet d'histoire naturelle officialisée le 6 juin 1795. Il naît le 6 mai 1738 à Saint-Sulpice dans le Val-de-Travers. Quittant un apprentissage de commerce, il s'enrôle en 1755 dans le régiment de Hallwyl au service du roi de France et participe comme sous-lieutenant à la campagne navale contre les Anglais aux Antilles. Il se fait ensuite incorporer dans le régiment des gardes suisses où il obtient le grade de colonel. En 1781, il lève son propre régiment pour la Compagnie hollandaise des Indes orientales et conduit ses troupes au Cap de Bonne-Espérance. Au bout de cinq ans, il en laisse le commandement à son frère Pierre Frédéric et regagne l'Europe. En 1795, il passe au service de Sa Majesté britannique et se rend en Inde afin d'avaliser ce transfert. Il n'en revient que deux années plus tard et se retire finalement en 1800 à Neuchâtel où il acquiert la propriété de la Grande Rochette. Il décède le 4 avril 1806.
Partant d'un fonds naturaliste existant probablement dès la première moitié du XVIIIe siècle, il complète son Cabinet par son réseau de relations autant que par ses voyages. Avant de le céder à la Commune bourgeoise, il en fait établir un nouvel inventaire par un secrétaire français qui l'organise selon les trois règnes minéral, végétal et animal, alors que la séquence traditionnelle privilégiait l’ordre inverse, les objets manufacturés étant regroupés chaque fois sous l'en-tête «autres objets».
Dans l'esprit de l'Encyclopédie, cette réunion d'objets correspond à un projet de connaissance sinon d'instruction; il est remarquable qu'un particulier en ait fait dresser la liste et plus encore que chaque spécimen soit pourvu d'une cote.
Comme il n'est pas possible de présumer de la disposition d'origine, la présentation, qui fait recours aux couleurs en s'inspirant de celle de la Kunst- und Wunderkammer du château d'Ambras (Tyrol), se présente comme une évocation et non comme une reconstitution.