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PASSEPORT POUR L'ÉTERNITÉ

Santa Clara, décembre 1958. La colonne numéro 8 commandée par Ernesto Che Guevara prend la ville aux troupes de Batista et voit s'ouvrir ainsi la route de La Havane, ville que les rebelles atteindront le 1er janvier 1959.

Santa Clara, 16 octobre 1997. Encadrée par un service d'ordre efficace, une interminable colonne humaine se déplace lentement à travers les rues de la ville. Des haut-parleurs diffusent en sourdine la chanson Hasta siempre, que tout le pays ou presque entonne sans discontinuer depuis plusieurs semaines. Sur le parcours, une grande affiche annonce la venue prochaine de Jean-Paul II, signe supplémentaire qu'une page de l'histoire cubaine est en train de se tourner.

Une fleur à la main, les fidèles pénètrent en rang par deux dans une salle de la bibliothèque municipale José-Marti solennellement décorée et défilent devant des coffrets de bois vernis. Ils honorent ainsi les restes d'Ernesto Che Guevara et de six autres guérilleros – quatre Cubains, un Péruvien et un Bolivien – dont les squelettes avaient été retrouvés dans la même fosse commune de Vallegrande (Bolivie). 

Les sept guérilleros seront inhumés le lendemain dans un mausolée qui leur restera consacré, au terme d'une cérémonie militaire impeccablement réglée. Ainsi, 30 ans après leur mort, Che Guevara et ses six compagnons accèderont-ils enfin au statut d'ancêtres d'une révolution cubaine en mal de modèle et d'une communauté internationale en peine de figures héroïques. 

«Castro devra choisir entre l'aide soviétique et le Che. Il a évidemment choisi: le Che est sacrifié. Commence alors le long itinéraire suicidaire du Che, qui va le mener jusqu'au fin fond d'un désert bolivien. Il est sans doute donné par les Soviétiques, par les Cubains, et trahi certainement par les rares paysans qui peuplaient la zone choisie. Le Che avait échoué au pouvoir. Il en a été exclu. C'est ainsi que le mythe a été sauvé: sur un malentendu, comme s'il était la victime anarchisante d'une révolution blindée, lui l'homme implacable. Et puis la fin légendaire, son périple désespéré dans les canyons boliviens, tête baissée, courant de ratage en ratage, dans une sorte de symétrique inversée de l'aventure cubaine, le préserve de la déchéance des mythes révolutionnaires. Le Che s'en sort in extremis.» (Serge July, Libération, 4-5 octobre 1997)

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